Quelles mesures avez-vous prises au départ du confinement ?
La décision a été de fermer l'ensemble de nos agences, dès le 17 mars à midi, suite à la décision de mise en confinement. Seul notre siège social comptait encore une permanence d'une demi-douzaine de salariés, de manière à s'organiser. J'ai demandé que les déplacements soient limités au strict nécessaire. Des mesures de chômage partiel ont été mises en place pour une part des collaborateurs, quand d'autres ont pu poursuivre leurs tâches via les solutions de télétravail. La priorité était avant tout la santé des salariés. Ensuite, nous avons vu comment aider nos clients, particulièrement dans l'industrie, à maintenir leur activité.
Très discret depuis le début de cette crise, le groupe Kiloutou a-t-il contribué à l'effort collectif ?
Dès les premiers jours de confinement, nous avons fait preuve de solidarité, en mettant à disposition gracieusement du matériel. Nous avons ainsi aidé une bonne trentaine d'hôpitaux en état d'urgence sanitaire, en fournissant des groupes électrogènes, des systèmes de chauffage, des tentes, des bancs… Essentiellement des équipements dédiés à la création d'espaces de repos pour les personnels en première ligne. Je tiens à souligner l'engagement massif et la réactivité de nos collaborateurs, ainsi que la grande fierté de tous à ainsi pouvoir contribuer à l'urgence sanitaire nationale.
"Nous avons fait preuve de solidarité"
Vous annoncez des réouvertures d'agences. En quoi consiste votre calendrier ?
Nous travaillons sur l'élaboration d'un plan de relance depuis les premières semaines de la crise. Après avoir testé nos protocoles dès le 2 avril dans quatre agences pilotes, nous sommes désormais en mesure de pouvoir rouvrir massivement notre réseau. Actuellement [au 16 avril, NDLR], une vingtaine de nos agences ont été remises en marche, couvrant les principales métropoles de toutes les régions administratives françaises. D'ici le 24 avril, nous prévoyons d'en ouvrir 48 autres. L'idée étant qu'à la mi-mai, nous soyons en situation d'avoir ouvert entre 150 et 200 de nos agences, sur les 427 que nous comptons sur le territoire. La réouverture se fait progressivement pour permettre la formation des équipes aux nouveaux protocoles sanitaires. Il est important de préciser que, jusqu'à nouvel ordre, nos agences ne serviront que les professionnels.
Quels protocoles sanitaires avez-vous mis en place dans vos agences et vos ateliers ?
Nous avons devancé la publication du guide de l'OPPBTP en imaginant très rapidement la mise en place d'un certain nombre de mesures. Puis nous avons vérifié si notre protocole reprenait bien les recommandations du guide et permettait la reprise en toute sécurité de nos opérations tout en s'insérant dans les différents protocoles en œuvre chez nos clients. Concrètement, nous avons banni les contacts physiques entre personnes. Les signatures et les paiements se font de manière entièrement dématérialisée. L'enlèvement et le retour de matériels sont effectués désormais sur les parkings des agences. Nous avons délimité des box : le client, qui a effectué sa réservation par téléphone, reste dans son véhicule. Cela ressemble au système "drive" des supermarchés ou des négoces. Sur les chantiers, qu'il s'agisse de livraisons ou de reprises, le sans-contact est également de rigueur. La sécurité de tous est ainsi garantie.
"200 millions d'euros de trésorerie sécurisés"
De quels équipements individuels disposent vos équipes ?
Les matériels sont lavés une première fois lors de la réception. Puis une seconde au moment de l'enlèvement ou de la livraison. Le tout à l'aide d'une solution détergente désinfectante. Nos collaborateurs sont équipés de gants, mais nous ne disposons pas de masques à l'heure actuelle [au 16 avril, NDLR], étant donné que nous avons donné nos stocks au corps médical. Nous avons passé une grosse commande, qui devrait nous arriver, si tout va bien, sous peu.
Êtes-vous d'ores et déjà en mesure de chiffrer les pertes financières ?
Il est encore trop tôt pour se prononcer, mais il est clair qu'elles seront conséquentes. Si nous sommes focalisés sur l'urgence sanitaire, nous n'avons pas oublié les aspects économiques. Nous avons anticipé dès le début du mois de mars, en sécurisant notamment nos financements. Nous disposons ainsi de 200 millions d'euros de trésorerie nous permettant de faire face à cette crise et de tenir plusieurs mois en situation d'activité très ralentie. Nous avons par ailleurs pris la décision de faire passer les factures de nos fournisseurs en priorité : aucun retard ne sera toléré. Car il n'est pas question de mettre nos partenaires en difficulté. C'est au contraire le moment de consolider notre rapport de confiance. Idem du côté de nos clients : nous dialoguons avec eux, suivant leurs situations individuelles, pour les accompagner au mieux.
"Nous rediscutons nos achats matériels"
Vos investissements matériels seront-ils remis en cause ?
Bien que constituant un axe stratégique, il est évident que nos achats seront réduits dans les mois à venir, étant donné les incertitudes du marché. Dans ce cadre, nous avons contacté chacun de nos fournisseurs, pour rediscuter nos approvisionnements de façon constructive. Dans le but de sauvegarder nos relations commerciales et les mettre le moins possible en difficulté, nous avons décidé que toute machine commandée et mise en production sera réceptionnée comme il était convenu.
Pensez-vous pouvoir être en situation de compenser, au moins en partie, le manque à gagner ?
L'éventuel "effet rattrapage" est entièrement conditionné par nos clients. Or ils ne vont pas pouvoir mettre systématiquement les bouchées doubles. Nous allons vite nous retrouver face à des goulots de production à chaque niveau de la chaîne. Avant de penser à compenser les pertes, il serait déjà fantastique de constater que la filière reste intacte. Avec aussi peu de défaillances que possible, au regard de la cascade qu'elles peuvent engendrer.
Cette période occasionnera-t-elle une remise à plat de vos méthodes de travail ?
Si cette crise a un effet bénéfique, cela sera de permettre de tester les process de travail à distance. Le télétravail est une tendance de fond qui va se développer partout, nous n'y ferons pas exception. Il combine sécurité et efficacité. Il s'agira de l'inscrire dans la durée, en définissant de nouveaux protocoles. Le service du drive pourrait également être maintenu dans l'avenir. Il en va de même de la dématérialisation, dont je prévois l'accélération pour le marché de la location. Les enseignements sont nombreux, les relations et méthodes de travail feront indiscutablement l'objet d'une grande réflexion globale.
Propos recueillis par Arnault Disdero
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