Des matériels toujours plus compacts. Bien sûr, mais jusqu'où ? Les pelles ont été les premières à ouvrir le bal. Sur le segment des minipelles, le rayon court et la ZTS (zéro déport arrière) se sont largement imposés. Les midi-pelles de 15, 22?t et plus ont rapidement suivi. La densification des villes et la réduction des espaces dévolus aux chantiers expliquent en grande partie ces choix. Limitation de la giration des tourelles, réduction de la largeur et de la hauteur des machines... Ne pas avoir à regarder derrière soi et pouvoir se coller contre un mur sans prendre le risque de le faire tomber sont devenus un « minimum syndical ». Dans le dernier numéro du Moniteur Matériels (n° 6210 du 16 septembre 2022), Nicolas Proust, directeur général de Steelwirst France, le reconnaissait lui-même : « Encore récemment, quand on parlait de pelle de démolition, on pensait immédiatement à un engin de 40 t au minimum. Désormais, cette activité se fait de plus en plus avec une pelle urbaine à rayon court de 20 à 25 t, voire parfois une pelle de 14 t sur chenilles [grâce à des outils à l’ergonomie repensée, NDLR]. Cette tendance au petit tonnage s’explique par la diversification des chantiers des clients, qui acquièrent ces outils pour avoir des opérations complètes, là où hier ils sous-traitaient à un locatier ou à une autre société de démolition.»
Gagner de la place à tout prix
« Nos chargeuses peuvent autant être utilisées pour le terrassement que comme porte-outils, ou équipées de godets grappin », assure Benoît Fénéon, responsable marketing produits de Mecalac, confirmant la demande croissante pour des machines toujours plus polyvalentes, en plus d’être compactes. Autre preuve : la nouvelle pelle araignée de JLG, la X22SJP, proposée avec trois types de propulsions différentes : diesel, hybride et full lithium. « Grâce à ces trois options, cette machine est adaptée à de nombreuses applications différentes », commente David Courtin, directeur des ventes pour l'Europe du Sud, la Turquie et l'Afrique du Nord et de l'Ouest de JLG, avant de préciser : « Une fois rangée, cette machine a pour autre particularité d’être extrêmement compacte, avec une largeur de 88 cm seulement, soit 10 cm de moins que la plupart des marques concurrentes. Et ce, quel que soit le mode de propulsion choisi. » Autre exemple de gain de place : les chargeuses de la gamme Swing de Mecalac qui, en plus d’être conçues sur la base d’un châssis monobloc avec trois modes de direction en série (deux roues directrices, quatre roues directrices, crabe), sont équipées d’un bras qui pivote au lieu de se déplacer. Là où une chargeuse classique a besoin de 10 m d’emprise pour charger un camion, la distance se retrouve ici ramenée à 5 m.
En France, les chantiers urbains se multiplient, portés en grande partie par des besoins de nouveaux logements et la création de réseaux de transport. À eux seuls, les chantiers du Grand Paris Express ont généré des centaines d’appels d’offres, auxquels autant d’entreprises, sinon plus, se sont portées candidates. De quoi aiguiser les appétits et encourager les entreprises à se réorganiser pour gagner en proximité et, par conséquent, en efficacité commerciale.
Depuis mai dernier, les chargeuses compactes et articulées de la marque Gehl (groupe Manitou) sont distribuées par 11 concessionnaires exclusifs dans 21 points de vente. Un an plus tôt, Ammann France annonçait reprendre la distribution directe et le SAV de ses matériels sur toute l’Île-de-France, pour « gagner en proximité et en réactivité ». Parmi les matériels proposés : des compacteurs légers à guidage manuel de 30 à 800 kg, des minipelles de 1,2 à 11 t ou des chariots télescopiques de 9 à 18 m. Les centres urbains sont logiquement demandeurs, pour des chantiers souterrains ou des travaux de surface. Mais comment allier compacité et puissance, sachant que les contraintes imposées par les villes portent de plus en plus sur des motorisations alternatives, ce qui, dans le cas des engins 100 % électriques, a pour effet de limiter leur tonnage pour des raisons évidentes de puissance ?
Autre frein : le prix. L’idée de payer 50 %, voire 100 % de plus que le même matériel équipé d’un moteur thermique a de quoi faire réfléchir. Dans le portefeuille des constructeurs, les modèles électriques ou thermiques restent des offres complémentaires, voire anecdotiques, même lorsqu’ils reconnaissent que certains segments comme celui « des chariots télescopiques super compacts connaissent une croissance plus rapide que l’ensemble de l’industrie. » Personne ne démentira cette constatation faite par Mike Vought, vice-président gestion des produits chez Doosan Bobcat Emea à l'occasion de la présentation des dernières nouveautés du groupe, parmi lesquelles un nouveau télescopique ultra-compact (TL25.60), une chargeuse compacte sur pneus (S86) et une autre sur chenilles (T86). Malgré leur compacité et leur positionnement sur le segment des matériels de petit tonnage, les trois modèles ne sont ni électriques, ni hybrides, mais fonctionnent au diesel.
Hakim Bendaoud