Baptisé "Maria Bodin" en référence à sa marraine – un des personnages du duo d'humoristes Les Bodin's –, le microtunnelier s’est vu confier une mission inédite en France pour un engin de son gabarit : réaliser un fonçage en un seul tir, sur une distance de 620 m, au moyen d’un AVN 2200 d'Herrenknecht. À coup sûr, une première en France. Originale, l’opération menée par la Sade n’en reste pas moins symptomatique d’une évolution générale de la demande des maîtres d’ouvrage préférant de plus en plus souvent disposer de galeries imposantes afin de faciliter les visites d’inspection et d’y intégrer divers réseaux. Deux possibilités que n’offrent pas vraiment les machines traditionnelles de 1 600 et 1 800 mm de diamètre.
Dans ce contexte, rien d’étonnant de voir retenu un modèle de diamètre important lorsqu’il a été question de remplacer et d’enterrer des canalisations jusqu’alors fixées sous le tablier du pont de La Motte à Saint-Cyr-sur-Loire (Indre-et-Loire), dont la vétusté entraînait des déversements dans la Loire. "Au lieu d’opter pour une canalisation d'un diamètre de 1 600 mm, Tour(s)plus a voulu se doter d’un ouvrage susceptible d’accueillir une canalisation de refoulement, mais également un réseau d’eau potable et une série de fourreaux pour déployer la fibre optique", détaille le chef de division travaux souterrains de la Sade, Rémi Subra. L’utilisation de la machine souligne également une tendance à l’allongement des tirs, en vue de raccourcir les délais de réalisation. Pour remplir sa mission, le microtunnelier a donc été équipé d’une roue de coupe mixte, conçue spécifiquement pour l’occasion. Elle doit lui permettre de franchir les différentes couches au programme : sable, tuffeau (calcaire) et béton lors de son arrivée au poste de refoulement. Pour faire bonne mesure, le banc de poussée a été légèrement surdimensionné et propose une capacité de 1 000 t, plus commune sur des modèles 2 500 mm.
Pourtant, à en croire Rémi Subra, pousser un AVN 2200 sur plus de 600 m ne soulève pas (ou plus) de réels problèmes techniques. Sauf quand il s’agit de prendre en compte une forte courbure comme c’est le cas sur ce projet. Mais cette caractéristique du tracé concerne davantage la jonction des segments de tuyaux que la machine en elle-même. « Depuis son développement dans les années 1990, la technique du microtunnelier a progressé en termes de puissance, de fiabilité et, peut-être plus encore, de précision. Cette évolution explique que nous puissions aujourd’hui pousser des diamètres plus importants sur de longues distances », assure-t-il. Une forme de maturité technique apparemment en adéquation avec les nouvelles attentes du marché.
Jeremy Bellanger