Energie : transition en vue pour les matériels de construction

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Progrès des batteries et envolé des prix du GNR rapprochent aujourd’hui le coût de possession d’un engin compact électrique de son équivalent thermique. Une dynamique propice à un développement accéléré de ce type de matériels, à condition de réduire un tarif d’achat toujours dissuasif.

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Energie : transition en vue pour les matériels de construction © AdobeStock

Une fenêtre d’opportunité est peut-être en train de s’ouvrir pour les professionnels du secteur de la construction impliqués dans la transition énergétique des machines. En témoignent les chiffres avancés lors des Rencontres du Matériel Durable, organisées par Kiloutou et qui regroupaient, le 1er février dernier, un large panel de fabricants, de loueurs et d’utilisateurs ainsi que leurs fédérations professionnelles respectives.

En 2021, le coût total de possession [NDLR : achat, maintenance, consommation, revente] d’une mini-pelle électrique de 2,5 tonnes était encore 40 % plus élevé que celui de son équivalent thermique. Aujourd’hui, il ne l’est plus que de 5 à 10 %. L’écart se resserre et pourrait même être comblé au 1er janvier 2024 avec la fin programmée des dégrèvements fiscaux sur le GNR.

Batteries plus accessibles et GNR qui flambe

Cette baisse impressionnante est, pour moitié, due à celle du prix des batteries et à leur évolution technologique. « Il y a deux ans, les industriels estimaient qu’il faudrait la remplacer une fois au cours du cycle de vie d’une machine. C’est devenu inutile aujourd’hui », détaille le président exécutif du groupe Kiloutou, Olivier Colleau.

L’autre raison est, quant à elle, conjoncturelle. L’inflation à laquelle n’échappe pas le GNR renchérit mécaniquement le coût de possession d’un matériel thermique. Si l’on ne peut se réjouir d’une telle flambée des prix de l’énergie, ni prédire leur fluctuation dans les mois à venir, elle incite le marché à se tourner vers les alternatives aux diesels.    

Un moment décisif

Alors que l’équation économique semble en voie de résolution, le dirigeant de Kiloutou appelle à ne pas relâcher l’effort. « Nous devons continuer de creuser le sillon de la mobilisation de tous les acteurs, afin d'aligner nos choix stratégiques, y compris technologiques », poursuit-il, bien conscient que la synchronisation des attentes et des agendas de toutes les parties prenantes, le partage de référentiels communs et les travaux collectifs ciblés sont autant de conditions indispensables à la réussite de la transition énergétique. « Nous sommes dans un moment décisif qu’il faut savoir saisir. Même si d’autres questions sociétales peuvent légitimement nous occuper, n’oublions pas que des tonnes de CO2 continuent toujours d’être émises à l’heure qu’il est ».

Vers des aides à la conversion ?

Reste que pour espérer respecter les trajectoires de baisse des émissions que se sont imposées nombre d'entreprises, le volume de matériels alternatifs dans les parcs doit augmenter de manière substantielle. « Le rétrofit de certaines machines [transformation d’un matériel thermique en matériel électrique, NDLR] est une piste intéressante que nous explorons d'ailleurs avec Manitou comme partenaire, mais elle ne sera pas suffisante. C’est au niveau de l’achat de matériels neufs qu’il faut agir sans attendre pour réduire l’inertie entre la prise de décision et ses effets sur les émissions de CO2. N’oublions pas que le rythme de renouvellement d’un matériel avoisine 10 ans », détaille Olivier Colleau.

C’est justement sur cette question du prix d’achat d’un matériel électrique que le bât blesse. Même convaincues, les entreprises ne peuvent se permettre de débourser 40 % de plus que pour une machine conventionnelle. En l’état de l'offre, impossible donc d’atteindre les volumes de ventes qui permettraient de faire une vraie différence écologique et de baisser, du même coup, les prix par économie d’échelle.

D’où l’appel de nombreux professionnels à dégager une enveloppe de crédits dédiés à la conversion. Du côté des fédérations, on évoque des discussions autour d'une somme comprise entre 60 et 100 millions euros par an. S’il ne se risque pas à de tels chiffrages, Olivier Colleau partage néanmoins cette conviction qu’un « soutien temporaire de la puissance publique pour accompagner la montée en charge est indispensable. Le bonus écologique dans le monde de l’automobile a prouvé son efficacité. Aujourd’hui, s’équiper d’une voiture électrique ou hybride est bien plus accessible que par le passé. Orienter les décisions : c’est à cela que doit servir la fiscalité. Par exemple, si l’on doit cesser demain les exonérations sur le GNR, il me semblerait normal de flécher les sommes récupérées vers des aides à la conversion des matériels ».

Une option, a priori, logique pour aider à franchir un pas de plus vers la transition énergétique et se projeter vers les suivants, parmi lesquels le déploiement et l’accès aux infrastructures et modules de recharge.

Jeremy Bellanger