Dieselgate : un cabinet appelle les entreprises de BTP à se porter partie civile

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Bureau Brandeis veut mobiliser les propriétaires de flottes dont les émissions de CO2 des véhicules ont été minorées afin de lancer une procédure collective.

 

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Dieselgate : un cabinet appelle les entreprises de BTP à se porter partie civile © Adobestock

Aux Etats-Unis, Volkswagen a payé plusieurs milliards de dommages et intérêts dans l’affaire du « dieselgate », ce scandale des émissions de CO2 frauduleusement réduites par des dispositifs les faisant apparaître comme moins polluantes qu’elles ne l’étaient en réalité. En Allemagne, le constructeur a versé 800 millions d’euros pour indemniser 200 000 propriétaires de véhicules. En Angleterre, cela lui a coûté 250 millions d’euros. En France, tout reste encore à faire. Car ici, le dieselgate démarre à peine : Volkswagen, mais aussi Stellantis et Renault, ne sont mis en examen que depuis le printemps 2021 pour délit de tromperie aggravé (car portant atteinte à la santé humaine), et la procédure pénale ne devrait s’accélérer que cette année, avec un possible renvoi en correctionnelle annoncé fin 2023/début 2024.

 

Pour le moment, en France, seuls des particuliers ont déposé plainte, soit individuellement, soit en étant représentés par des associations de consommateurs. Pourtant, les entreprises peuvent, elles aussi, se porter partie civile et sont protégées en tant que consommateur au même titre que les particuliers… C’est pourquoi un cabinet d’avocats, Bureau Brandeis Paris, spécialisé dans les actions collectives à forts enjeux économiques, a décidé de passer à l’attaque ce printemps. « Nous considérons qu’il y a en France 3,6 millions de voitures touchées par ce scandale, dont la moitié ont été achetées par des entreprises ou des collectivités, explique maître Marc Barennes, avocat associé et fondateur du bureau parisien de Brandeis, Or, nous avons déjà un certain nombre d’entreprises parmi nos clients qui possèdent une flotte de voitures de fonction. Plusieurs nous ont interrogés pour savoir s’il était possible d’obtenir une réparation pour leur parc diesel ». Bureau Brandeis a étudié le dossier et prépare désormais activement une procédure collective. C’est d’ailleurs conforme à l’ADN du cabinet : « Nous nous positionnons depuis notre origine comme un cabinet de plaignants, et non de défenseurs, nous n’acceptons que des dossiers de victimes, autant pour éviter tout conflit d’intérêt que par conviction », affirme Me Barennes. Le bureau est adossé à la société Bench Walk Advisors, un fonds de contentieux londonien spécialisé dans le financement de litiges : il prend tous les frais de procédure à sa charge (honoraires des avocats, expertises diverses…) et se paie ensuite en récupérant 30% du montant total des dommages et intérêts versés – si victoire il y a. Si le procès est perdu, c’est une perte sèche pour lui.

 

Aujourd’hui, plusieurs dizaines d’entreprises, dont les plus petites, possèdent une cinquantaine de véhicules et les plus grandes plus de 5000, sont prêtes, selon Bureau Brandeis, à se porter partie civile. Me Barennes s’est fixé un plancher de 100 000 véhicules défectueux pour lancer l’action collective, « a priori d’ici l’été prochain », tout en espérant idéalement pouvoir défendre « toutes les entreprises françaises ». Il estime pouvoir obtenir entre 2000 et 3000 euros par véhicule défectueux. Si l’on considère qu’il y a bien 1,8 millions de véhicules concernés, le montant total, pour les trois constructeurs, pourrait donc s’élever au minimum à 3,6 milliards d’euros... Pour le moment, une seule entreprise de BTP, dont le nom restera confidentiel jusqu’au lancement de la procédure, s’est jointe au groupe des plaignants. « Bien sûr, les entreprises qui ont des véhicules de fonction mais aussi de service craignent toujours les conflits avec leur fournisseur principal, reconnaît Me Barennes. Mais comme nous nous attaquons à tous les constructeurs à la fois, les mesures de rétorsion ne sont pas réellement possibles – d’autant que les constructeurs coréens sont commercialement très agressifs en ce moment… La concurrence est une bonne porte de sortie si besoin ! ».

 

Anna Rousseau