Détail des mesures pour accompagner la hausse du gazole non routier

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La suppression de la niche fiscale dont bénéficiait ce carburant est actée depuis le mois dernier. Pour atténuer les effets de cette décision sur le secteur du BTP, l'Etat a fait en sorte qu'elle soit progressive et assortie d'un dispositif de suramortissement. Explications.

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La hausse s'étalera du 1er juillet 2020 au 1er janvier 2022. © Le Moniteur Matériels
Les députés ont adopté, le 22 octobre dernier, la première partie du projet de loi de finances pour 2020. Son article 16 prévoit une évolution de la fiscalité du gazole non routier (GNR), suivant une trajectoire de hausse s'étalant du 1er juillet 2020 au 1er janvier 2022. L'effort, qui représenterait une ardoise de 750 millions d'euros pour le secteur du BTP, selon la FFB et la FNTP, est lissé dans le temps, et la première marche sera aussi la plus haute.

Qui est concerné ?

Les usages visés sont les installations et machines destinées à la construction, au génie civil et aux travaux publics, ainsi que les autres véhicules employés en dehors des voies ouvertes à la circulation publique. Un régime fiscal adapté est prévu pour le GNR utilisé dans certains secteurs afin de ne pas les pénaliser : industries extractives fortement exposées à la concurrence internationale (notamment l'activité d'extraction de roches pour la construction), manutention portuaire dans les grands ports maritimes, missions de service public en zone de montagne (notamment pour le déneigement des routes), transport ferroviaire et fluvial. Le secteur agricole, qui bénéficie d'un tarif et d'un régime de remboursement spécifiques, n'est pas concerné par cette mesure.

Mise en place d'un dispositif de suramortissement

Pour accompagner cette hausse des tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), le gouvernement prévoit la création d'un dispositif de suramortissement à hauteur de 40% qui permettra de soutenir les entreprises qui investiront dans des engins neufs de substitution (électrique, hybride, hydrogène, gaz naturel) entre le 1er janvier 2020 et le 31 décembre 2022. Un amendement prévoit même un suramortissement à hauteur de 60% pour les PME. Il est prévu que ce dispositif s'applique aux entreprises de travaux publics et du bâtiment (maçonnerie, couverture-charpente, démolition).

D'autres actions sont possibles et même nécessaires

Si le suramortissement est une mesure incitative intéressante, elle reste limitée dans le temps et ne concernera que quelques engins neufs. Tandis que les acquisitions de machines à moteur thermique continueront, les offres des constructeurs pour réduire les consommations de carburant ou pour former les conducteurs à l'écoconduite seront, à n'en pas douter, étudiées de près par les exploitants. Quant aux engins dotés de batteries (surtout pour les applications "outdoor", qui correspondent davantage aux applications BTP), il reste à lever des obstacles administratifs (délais d'autorisation de raccordement à des coffrets temporaires électriques) et réglementaires (exigences à adapter pour la technologie Li-ion). Dans le domaine des chariots télescopiques, la parution récente de la norme européenne EN 16796-4 sur la mesure de consommation des chariots tout terrain est une avancée importante, car elle permettra aux utilisateurs de pouvoir comparer suivant une méthode commune la consommation de ces matériels courants dans le bâtiment.

La position des constructeurs

L'offre globale des constructeurs en matière de conversion vers d'autres motorisations ou d'économie d'énergie sur les versions thermiques a été présentée en juin 2019 à Bercy. Evolis a souligné les freins constatés (administratifs et réglementaires) liés à la problématique de rechargement des batteries Li-ion. Certaines des préconisations semblent avoir été écoutées : le lissage dans le temps de l'augmentation du GNR et la mise en place d'un dispositif de suramortissement. L'organisation professionnelle a déposé un amendement destiné à étendre le dispositif de suramortissement aux entreprises industrielles, sachant qu'un second amendement prévoit l'extension aux entreprises de location et aux paysagistes. En attendant la généralisation de nouveaux engins de substitution dans les petites et moyennes puissances, d'autres actions sont actuellement menées pour accompagner les acquéreurs d'engins neufs utilisant du GNR. Par exemple, les dispositifs Stop & Start devraient entrer sous peu dans les certificats d'économie d'énergie, ce qui facilitera l'acquisition de ce type d'options qui étaient boudées jusqu'alors.
 
Richard Cleveland, directeur du pôle technique & environnement d'Evolis