Comment le parc machines du groupe Razel-Bec traduit-il son activité internationale ?
Raphaël Boza: L’international génère 30 % de notre chiffre d’affaires, mais il concerne la majorité des matériels qui composent notre parc. Nous sommes présents dans près de 20 pays, avec une empreinte très marquée sur le continent africain : Algérie, Mali, Côte d’Ivoire, Afrique centrale, Congo, Guinée équatoriale, Tchad… Or, pour exister sur ces marchés émergents, il faut pouvoir être autonome aux niveaux opérationnel, logistique et énergétique. Le manque d’infrastructures et la faiblesse de l’offre locative dans ces zones nous y obligent. Du petit groupe électrogène au plus gros engin, en passant par le camion et sa remorque porte-char, il nous faut tout posséder pour être certains de pouvoir mener à bien les projets qui nous sont confiés. C’est ce qui explique pourquoi l’export mobilise 70 % de notre parc, soit une valeur neuve de revente que j’évaluerai à 250 millions d’euros.
Votre approche en tant que directeur matériel est-elle la même que sur le marché français ?
Raphaël Boza: L’exercice est vraiment différent. En France, il existe une forme de récurrence dans la gestion d’un parc, liée au rythme de renouvellement, à l’adaptation aux évolutions réglementaires et à un dimensionnement en fonction des tendances du marché. À l’export, il faut sans cesse être dans l’adaptation. C’est très stimulant de se dire que demain il faudra potentiellement acheter pour 15 millions d’euros de matériels afin de répondre à un chantier en Côte d’Ivoire, par exemple. C’est vraiment le projet qui guide nos investissements, plus encore que la dynamique globale de la région. Par exemple, nous investissons actuellement dans des matériels de fondation après avoir gagné un chantier de construction de deux quais dans le port autonome de Pointe-Noire, en République du Congo.
« C’est vraiment le projet qui guide nos investissements,
plus encore que la dynamique globale de la région. »
Est-il malgré tout possible de définir les caractéristiques types d'un parc dédié à l’export ?
Raphaël Boza: Le nôtre se définit par sa variété et son éclectisme en termes de marques. Nous possédons un large éventail d’engins de terrassement du D5 au D8, de pelles hydrauliques comprises majoritairement entre 8 et 50t, de tombereaux articulés. À la différence de la France, où nous ne possédons pas nos matériels de transport, ce segment est essentiel et très représenté pour les raisons que j’évoquais précédemment.
Parvenez-vous toujours à adapter vos moyens en fonction des projets, malgré l’engorgement mondial des lignes de production et les retards de livraison ?
Raphaël Boza: Cette problématique est moins handicapante dans une démarche de renouvellement. En revanche, si vous êtes en mode projet et qu’il faut démarrer un chantier alors que le fournisseur annonce treize à quatorze mois de délais, c’est une autre histoire. En Côte d’Ivoire notamment, nous rencontrons de grandes difficultés pour assurer certains chantiers à cause de ces délais allongés. Dans ces cas, nous devons chercher des solutions ailleurs, en déplaçant nos matériels d’un chantier à un autre sur de grandes distances, en recourant à l’occasion quand elle existe, ou en nous adressant aux brokers pour tenter de mettre la main sur des parcs complets de transport… Évidemment, nous pouvons également compter sur les distributeurs avec qui nous travaillons depuis de longues années et qui nous bloquent des machines. Mais ils ne peuvent pas les retenir six mois, seulement quelques semaines, car l’urgence est la même pour tout le monde. Ce contexte a quelque chose de schizophrénique, avec des délais de livraison sur certaines machines qui peuvent atteindre dix-huit mois et des clients qui veulent finir les chantiers avant même de les avoir signés. Et c’est sans compter l’augmentation des prix sur certaines machines, qu’il nous faut absorber. Sur les matériels de terrassement, ce surenchérissement peut dépasser les 15 % à cause du prix de l’acier.
Propos recueillis par Jérémy Bellanger et Charlotte Divet
Retrouvez l'intégralité de cette interview dans le Moniteur Matériels n°6172.